Comment Microsoft décide-t-il de l'opportunité des changements de comportement
de l'interface de ses produits ? L'éditeur affirme rechercher une facilité d'utilisation
accrue. On peut parfois douter du bon sens de Microsoft.
Un certain nombre de modifications de l'interface utilisateur ont commencé à faire
leur apparition dès les premières versions de Microsoft Internet Explorer 4.0,
avec un nouveau comportement installé par défaut : la commande d'action par clic
de souris unique. Les versions béta ultérieures et la version finale d'IE 4.0
le proposaient en option, mais retournaient, par défaut, au double clic antérieur.
La principale explication de cette modification de l'interface et du comportement
des produits Windows au cours de leurs derniers stades d'évolution, serait, à
en croire Microsoft, la facilité d'utilisation. L'éditeur affirme que, selon des
tests approfondis, les changements apportés à Windows NT 4.0 et Windows 9x facilitent
l'apprentissage et l'utilisation des produits.
Certes, ces changements ont sans doute amélioré l'" utilisabilité " de Windows,
mais beaucoup de modifications d'interface paraissent tout à fait gratuites. Y
avait-il beaucoup d'utilisateurs tambourinant à la porte de Microsoft en réclamant
des couleurs dégradées pour les barres de titre et la possibilité, pour les menus,
de s'étendre et de se contracter, au lieu d'apparaître simplement ?
Windows et les évolutions d’interface
En expérimentant les bétas d’Office 2000 et Windows 2000 j’ai eu l’occasion d’examiner
les tout derniers changements d’interface. Tout ce que je peux dire c’est qu’ils
facilitent peut-être l’apprentissage des produits, mais obligent, d’un autre côté,
les utilisateurs expérimentés à changer leurs habitudes de travail. Personnellement
je ne pense pas que ce soit là une bonne chose, surtout quand on considère la
pénétration des produits Office dans le monde du travail. Même si la période d’adaptation
pour un utilisateur expérimenté n’est que d’une ou deux semaines par application,
elle s’ajoute à une énorme perte de productivité sans la contre-partie d’une valeur
ajoutée manifeste.
Les changement facilitent peut-être l’apprentissage des produits, mais
ils obligent les utilisateurs expérimentés à changer leurs habitudes de travail
La plupart des changements d’interface d’Office 2000 découlent d’une technologie
baptisée IntelliMenus, dont le prédécesseur n’est autre que l’option IntelliSense
intégrée par Microsoft dans ses outils de développement (par exemple Visual Studio
et ses divers composants). IntelliSense est à la base une fonction de complément
automatique intelligente. Lorsque vous commencez à taper un mot qu’IntelliSense
reconnaît comme objet dans le langage ou l’outil que vous utilisez, une case contextuelle
apparaît et affiche toutes les options possibles pour cet objet, et fournit la
structure et la syntaxe correctes de la commande. IntelliSense est une fonction
superbe qui évite aux développeurs les erreurs de syntaxe et de structure. Je
trouve très utiles les exemples contextuels transparents et je n’ai jamais entendu
quiconque dire du mal d’IntelliSense.
Le concept des IntelliMenus est apparemment plein de bon sens. Les utilisateurs
ne voient au départ que les options du menu qu’ils utilisent le plus communément.
Ces commandes apparaissent automatiquement, ce qui évite de devoir fouiller dans
des menus pour les trouver. En cliquant sur un petit chevron au bas du menu sélectionné,
en double-cliquant sur le nom du menu, ou simplement en gardant le menu ouvert
pendant environ 5 secondes sans faire de sélection, il est possible d’accéder
à la totalité des commandes du menu. La fonction IntelliMenu peut se désactiver
dans la suite Office au moyen de l’option Outils/Personnaliser.
La fonction IntelliMenu présente un certain nombre de comportements curieux. Par
exemple, les choix par défaut du menu Fichier de Word n’incluent pas la commande
Aperçu avant impression, pourtant utilisée fréquemment par tous les amateurs de
Word que j’ai pu interroger. Bien que le menu ajoute Aperçu avant impression dès
la première utilisation, son omission dans les choix par défaut laisse supposer
une vision un peu limitée des choses.
Les IntelliMenus ajoutent de nouvelles commandes aux options du menu chaque fois
que l’on utilise une fonction qui n’a encore jamais été utilisée. Au premier abord,
le fait de n’ajouter que les commandes nécessaires est intéressant, car la multitude
d’options des menus correspond à une inflation de fonctions apparue depuis une
dizaine d’années. Il est donc intéressant de réduire le nombre d’options, afin
de simplifier l’utilisation des menus. Mais en cachant des options de menus aux
utilisateurs, on leur cache, dans la plupart des cas, aussi les fonctions correspondantes.
Combien de nouveaux utilisateurs désactiveront-ils la fonction IntelliMenu ou
prendront-ils le temps d’examiner les fonctions que leur offre la suite Office
?
Une partie de mon processus d’apprentissage – et ceci est vrai aussi pour d’autres
utilisateurs de longue date avec lesquels j’ai discuté – consiste à être exposé
constamment à la liste des commandes qui apparaît lorsque j’ouvre un menu. Je
peux très bien ne pas avoir besoin de telle ou telle fonction, quand j’ouvre un
menu, mais à la longue je finis par en apprendre le contenu, même les commandes
que j’utilise rarement, voire jamais. Et lorsque l’occasion se présente de les
utiliser, je sais où les trouver.
Les Intelli Menus ajoutent de nouvelles options aux menus chaque fois
que l’on utilise une fonction qui n’a encore jamais été utilisée
Un autre problème posé par la fonction IntelliMenu est le changement de place
apparent des commandes, puisque de nouvelles commandes sont ajoutées au menu au
fur et à mesure qu’on les utilise. J’utilise souvent des options de menu communes
sans les lire vraiment, même lorsque je clique dessus avec une souris. Après tout,
si la commande que je veux est toujours la troisième option du menu, pourquoi
perdre du temps à la lire à chaque fois ? Or avec les IntelliMenus, la commande
que l’on veut utiliser peut très bien ne plus être la troisième option de la liste,
mais la quatrième ou la cinquième. Ce mouvement oblige à faire davantage attention
à l’interface, ce qui n’améliore pas la productivité.
Les Intelli Menus changent également le comportement des barres d’outils. Voici
ce qui m’est arrivé. Comme je travaille la plupart du temps sur un écran à haute
résolution (1600 x 1200), je conserve généralement toutes les barres d’outils
visibles.
Or, sur mon portable (avec un affichage 800 x 600), j’ai découvert que si la totalité
des barres d’outils n’était pas affichée, la technologie IntelliMenu déplaçait
les boutons sur les barres d’outils visibles. Les boutons changent de place et
peuvent disparaître de l’écran, selon que vous les utilisez ou pas, et comment
vous les utilisez. Supposons que vous ayez huit boutons que vous utilisez la plupart
du temps sur une barre d’outils spécifique et que la surface de votre écran ne
permet d’en afficher que quatre. La première fois que vous utilisez un bouton
qui n’est pas visible, l’un des boutons les plus utilisés disparaîtra de l’écran.
Cette disparition des boutons peut être irritante lorsque vous utilisez une application.
Sachez malgré qu’il sera possible de verrouiller les boutons à leur place.
J’ai vraiment laissé aux IntelliMenus toutes les chances de m’impressionner. Je
passe beaucoup de temps sur Word et pas mal sur Excel. J’ai laissé le contrôle
aux menus et après avoir utilisé continuellement les IntelliMenus pendant 4 mois,
je les trouve plutôt ennuyeux, par exemple lorsque j’utilise PowerPoint. En effet,
j’utilise rarement ce programme et j’ai donc réellement besoin des menus complets
pour que mon expérience d’utilisateur soit une réussite.
Bien entendu, je peux désactiver les IntelliMenus, mais je désactive alors ceux
de toute la suite Office, et pas seulement ceux de l’application active. Or comme
j’essaie de les utiliser dans d’autres applications, je ne les désactive pas.
Je pourrais certes désactiver les IntelliMenus dans d’autres applications, puis
les réactiver – mais si leur objectif est de simplifier la vie, cela n’a aucun
sens de les désactiver et de les réactiver, du point de vue de la conception.
Quelqu’un, ou un groupe de personnes, a décidé que la mobilité des options
des menus répond aux voeux des utilisateurs
Quelqu’un, ou un groupe de personnes, a décidé que la mobilité des options des
menus répond aux voeux des utilisateurs et c’est ainsi que l’on est même allé jusqu’à
ajouter les IntelliMenus à l’Explorateur de base de Windows 2000. Les IntelliMenus
évitent aux utilisateurs de devoir apprendre à manipuler l’interface et à organiser
les applications en groupes, pour limiter le nombre d’options à tous les niveaux
de l’écran et la nécessité de désinstaller certaines applications qu’ils n’utilisent
jamais. Avec les IntelliMenus, l’écran n’affiche que les applications fréquemment
utilisées par les utilisateurs.
En revanche, si une application installe plusieurs icônes dans le groupe Programmes
du menu Démarrer, l’interface affichera des parties de l’application qu’un utilisateur
n’utilisera jamais.
La confusion qui résulte de l’absence de certaines applications et de la présence
d’éléments d’applications supplémentaires dans l’Explorateur ne manquera pas de
donner lieu à des appels assez intéressants au support technique. Longtemps la
réponse des techniciens commencera invariablement par : » Allez au menu X et désactivez
la fonction Y « . J’aimerais vraiment savoir qui a décidé que les IntelliMenus
sont une bonne idée.
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