« Créer de la valeur » est sur toutes les lèvres depuis des décennies. Longtemps perçue comme l’affaire du département des ventes, la notion de valeur ne cesse d’évoluer dans le temps. Elle tient désormais compte de l’aspect émotionnel et est désormais l’affaire de l’ensemble des départements qui forment une chaine de valeur. En tant que fonction support, le département informatique est, de facto, partie prenante dans cette même chaine de valeur.
La gestion de portefeuille pour créer de la valeur
Au quotidien, les départements informatiques disposent en effet de nombreux leviers pour créer de la valeur. Certains sont très simples à mettre en œuvre et permettent de créer de la valeur immédiatement. D’autres, plus complexes au premier abord, donnent des résultats pérennes avec une vélocité accrue. La gestion du portefeuille informatique permet d’identifier au plus tôt les activités qui créent de la valeur et de les prioriser en tenant compte de nombreux facteurs pour optimiser cette valeur créée, le tout en s’intégrant avec les processus existants.
Le Larousse ne dénombre pas moins de 14 définitions pour le terme valeur, sans compter les expressions qui contiennent ce mot. Certaines de ces définitions sont purement objectives et se basent sur les coûts de production d’un bien ou d’un service ainsi que le prix de vente de celui-ci. D’autres font référence à la perception et à l’intérêt par le potentiel acquéreur.
Cette approche conceptuelle relève alors de la combinaison de facteurs forts différents tels que la marque, la culture d’entreprise, l’approche clientèle et bien d’autres. Pour le rendre concret dans le marché financier, un prix lui est alors assigné.
Ainsi, bien que le prix de la brique ne change que très peu d’une maison à l’autre, celui de la maison est très variable, en tenant compte du quartier, de l’infrastructure aux alentours mais aussi de l’histoire de la maison. De même, en observant le prix d’un autographe d’un chanteur connu, on comprend vite que la perception apporte énormément de valeur comparée au prix du papier seul.
Différents axes de la création de valeur
La valeur créée est la différence entre le résultat obtenu et le résultat théorique ou passé si certaines opérations n’avaient pas été effectuées. La valeur créée, ou valeur ajoutée, est bien connue du grand public, notamment du fait de la taxation qui est appliquée à l’aspect financier de la chose.
Dans un précédent papier, nous avons abordé la création de valeur en partant de la proposition de valeur. La proposition de valeur permet d’exprimer ce que le bien ou le service amèneront à l’utilisateur de celui-ci, de manière similaire à ce que la vision et la mission indiquent vers quoi tend une collectivité et comment elle se positionne pour y parvenir.
La proposition de valeur répond alors à ces trois questions :
- Quel est le problème à résoudre ?
- Qu’est-ce qui rend la solution unique ?
- Comment mesurer le résultat fourni par cette solution ?
La création de valeur est un des autres pendants du sujet. Elle est le reflet de l’implémentation des méthodes pour répondre à la proposition de valeur. On entendra d’ailleurs souvent parler de la création de valeur par tel ou tel intermédiaire tel que « la création de valeur par le marketing ». Chacun joue en effet un rôle dans la création de valeur à proprement parler. Si l’un ou l’autre venait à sous-performer, il en résulterait que la valeur créée serait bien plus faible voire nulle. C’est, par exemple, le cas lorsque des entreprises font des choix hasardeux quant à leurs partenaires pour la distribution des biens ou la revente de services alors que le produit avait une valeur élevée avant la distribution. La valeur créée est donc négative dans ce cas.
La chaine de valeur de Porter
La chaine de valeur, outil crée par Porter il y a près de 50 ans, a pour objectif de structurer des activités afin d’obtenir un avantage concurrentiel que ce soient des coûts inférieurs aux concurrents, des caractéristiques uniques, ou un segment de marché très particulier.
Pour faire simple, les activités sont groupées en deux grandes catégories : les activités de base et les activités de soutien. Les premières sont les activités plus facilement visibles de l’extérieur de l’entreprise tandis que les secondes sont celles nécessaires pour permettre aux premières d’exister.
Bien que schématiquement, il s’agit de créer des « cases », l’ensemble de ces activités doit être vu comme un bloc, en évitant tout cloisonnement. En effet, le positionnement des uns peut avoir des impacts, positifs ou négatifs, sur les autres. On pourrait citer quelques moyens de créer de la valeur qui exercent en effet une influence sur les autres départements : payer plus tard, louer, favoriser un mode de paiement plutôt qu’un autre, utiliser le cash différemment, adapter le prix des services, proposer des offres alléchantes (freemium par exemple), et bien d’autres.
Pour optimiser la création de valeur, une analyse systématique des activités doit permettre d’identifier les opportunités d’optimisation ou même la possibilité d’externaliser un certain nombre de ces activités notamment pour faire appel à des ressources spécialisées pour une durée déterminée. Par ailleurs, comme on peut aisément le comprendre, il peut y avoir plusieurs chaines de valeur imbriquées les unes dans les autres, notamment pour la fourniture de services à différentes étapes.
Tout cela est bien joli, mais concrètement qu’est-ce que cela veut dire en informatique ?
La création de valeur par l’informatique
Créer de la valeur de manière pérenne nécessite de prendre et d’implémenter des décisions long-terme qui doivent tenir compte de la stratégie, des priorités et des bonnes pratiques.
Pour créer de la valeur, il sera nécessaire de se poser les questions suivantes :
- Qu’est-ce qui est critique pour l’entreprise et crée un aspect concurrentiel fort au point de garder les sujets en interne ?
- Quelles stratégies doivent être appliquées aux différents sujets ? En général, 4 orientations peuvent être envisagées : investir, tolérer, arrêter ou remplacer.
- Comment l’organisation permet-elle de générer de la valeur ou à l’inverse qu’est-ce qui peut l’impacter négativement ?
La gestion de portefeuille informatique
Pour répondre à ces questions de manière systématique, la gestion de portefeuille est une approche très efficace. On parle bien ici de portefeuille et non de catalogue qu’il faut différencier. Les catalogues sont la liste des éléments actifs. Un portefeuille est en quelque sorte l’extension du catalogue puisqu’on y retrouve l’ensemble des éléments présents dans un catalogue mais aussi l’historique et les éléments candidats à être présents dans ce catalogue.
On trouve de nombreux catalogues : projets, technologies, services, licences, contrats, ou encore fournisseurs.
La gestion de portefeuille fait partie intégrante de la gouvernance informatique et se positionne entre la stratégie et l’architecture d’entreprise, le premier permettant de définir les objectifs et les priorités tandis que le second met en avant les plans de transition et les dépendances qui impactent les investissements dans l’informatique pour y parvenir. La gestion de portefeuille a ainsi pour but de définir les investissements adéquats et de s’assurer que chaque euro, chaque heure de travail génère quelque chose de positif. On retiendra bien souvent l’aspect financier de la chose puisqu’il est généralement possible de représenter un engagement, une formation et d’autres aspects par une valeur financière.
Pour parvenir à créer de la valeur de manière permanente, de nombreuses activités sont nécessaires : l’alignement stratégique des projets, la mesure de l’optimisation, la gestion des ressources optimale, l’augmentation de la capacité de livraison, la diminution des dépenses auprès de fournisseurs, l’amélioration de la qualité, et la responsabilisation des parties prenantes.
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Quelques activités clés de la gestion de portefeuille
Comme nous l’avons abordé précédemment, la gestion de portefeuille fait le lien avec de nombreuses autres activités et processus tel qu’on peut le voir ci-dessous au travers de ces cinq grands groupes d’activités qui font partie de la gestion de portefeuille :
- Gestion des demandes: choisir les sujets en lien avec les initiatives stratégiques.
- Planification de portefeuille: analyser et définir des plans multiples pour maximiser les bénéfices, en tenant compte des contraintes, des dépendances et des ressources disponibles.
- Optimisation du portefeuille : choisir le plan le plus efficace et revoir régulièrement le plan pour tenir compte des nouveaux éléments.
- Gestion des programmes et des projets: fournir le support nécessaire aux équipes d’implémentation en monitorant les performances classiques des projets et des liens divers.
- Gestion des déploiements: gérer les livraisons mais aussi les fournisseurs.
Afin d’être concret, on peut présenter une série de livrables issus de la gestion de portefeuille et leurs objectifs :
- Proposition de changement: communiquer un changement et évaluer les risques, les impacts et la faisabilité.
- Charte de projet : description de haut-niveau tels que les livrables, les ressources nécessaires et une estimation du plan projet. C’est sur cette base que se fait le design de la solution et du projet.
- Modèle de service : description de la structure de service, les composants et les interactions entre ceux-ci.
- Portefeuille de services: le service identifié à l’étape précédente doit explicitement être ajouté au portefeuille en même temps que l’ensemble des requêtes de service, c’est à dire tout ce qui peut être demandé par rapport à ce service.
- Rapport de revue du portefeuille: analyse régulière de l’ensemble des éléments du portefeuille afin d’identifier les besoins en termes de changements et les opportunités offertes par la rationalisation.
Structurer la démarche
Pour parvenir à fournir les différents rapports et autres documents, la gestion de portefeuille doit être structurée en une série d’activités que l’on peut rassembler en flux de travail et qui sont reliés entre eux, formant un cycle :
La collecte d’informations et l’étalonnage
- Lister l’ensemble des projets et des idées : obtenir l’information sur les projets, leurs fondements, la charge de travail potentielle mais aussi les coûts, les risques et les bénéfices.
- S’assurer que le besoin est aligné (business case) : en tenant compte des besoins métiers et de leur alignement avec la stratégie, il s’agit de s’assurer que l’initiative crée de la valeur.
- Valider les informations: recevoir des informations est assez simple, encore faut-il qu’elles soient justes. Il faut donc vérifier les différentes informations et les différents scénarios.
L’analyse stratégique
- Maximiser la valeur du portefeuille: le sujet est large. Il s’agit en effet d’optimiser et de revoir les différents portefeuilles en cherchant à exploiter les différents contrats, en se focalisant sur les plus importants mais aussi en évitant les doublons. Puisque le passé ne peut pas être changé, on veillera à se focaliser sur le futur et le consommable. De nouveaux projets support aux autres pourraient également apparaitre à cette étape.
- Aligner et prioritiser: en identifiant les points d’améliorations et les opportunités, il est ainsi possible de prioriser les investissements en fonction du retour attendu.
- Balancer l’offre et la demande: à tout moment, il est nécessaire d’identifier comment aligner au mieux l’offre et la demande de services.
La prise de décision
- Finaliser la proposition de portefeuille: il existe de nombreux portefeuilles et sous-portefeuilles. Les projets d’un portefeuille partagent des objectifs et des paramètres. Pour chacun des sous-portefeuilles tel que la création d’un nouveau département, d’une usine ou simplement l’amélioration du niveau de cyber sécurité, une proposition doit permettre de maximiser les résultats, en tenant compte des facteurs coûts et temps.
- Autoriser des projets : les projets ne font sens que s’ils créent de la valeur. Dans ce contexte, il est nécessaire de s’assurer que les projets mais aussi les attentes qui y sont liées soient en phase avec les objectifs et les critères du portefeuille tout en étant initiés au moment opportun.
- Autoriser des ressources: cette activité requiert de définir les plans et les besoins en termes de ressources en tenant compte de l’organisation des projets.
L’élaboration de chartes
- Communiquer les décisions: cette activité s’avère critique afin de s’assurer que l’ensemble des intervenants, notamment les membres des équipes projets, puisse prendre connaissance des dernières informations et décisions. La formalisation de la communication facilitera l’adoption de celles-ci.
- Réallouer les ressources: les ressources principales, c’est-à-dire celles critiques pour l’exécution des différents projets, doivent être gérées au niveau du portefeuille. L’équipe en charge du portefeuille étant responsable de créer de la valeur s’assure ainsi que les ressources sont allouées aux projets créant le plus de valeur a un moment précis.
- Créer ou modifier la charte des projets: le contexte dans lequel s’exécutent les projets varie au quotidien et de nombreuses nouvelles informations sont identifiées durant la vie du projet. Il s’avère alors nécessaire de revoir, après chaque phase de projet, la charte du projet et d’ajuster ce qui s’avère nécessaire pour tenir compte des nouveautés.
Par où démarrer ?
Au travers de ce papier nous avons pu voir qu’il existe de nombreux éléments à tenir compte pour créer de la valeur de manière efficace et que de nombreuses actions requièrent de la gouvernance au quotidien.
Ainsi, le plus simple sera de revenir aux fondamentaux et de connaitre votre propre activité. Cela semble évident pour beaucoup mais quelques questions simples permettront d’identifier des axes d’amélioration rapides à mettre en place :
- Ai-je une liste exhaustive des licences ? Quels sont les services Cloud qui coûtent le plus chaque mois ? Une liste exhaustive sera très utile mais on veillera à se concentrer sur les plus coûteux.
- Ai-je connaissance du catalogue de service et quelles sont les capacités de chacun de ces services ?
- De même, quelles sont les applications dans le giron ? Certains sont-ils en doublon ?
- Enfin, à quel point chacun des éléments ci-dessus sont-ils utilisés ?
Avec les réponses à ces questions, il est alors possible de rationaliser les différents catalogues en s‘assurant que les composants clés sont effectivement utilisés. Lors de l’optimisation, il convient de commencer avec ce qui n’est pas encore payé.
Si le contrat est d’ores et déjà payé, il n’est pas possible de le changer et l’effort fourni sera alors nul ou presque. Dans certains cas, il suffit de réduire le nombre de composants pour réduire immédiatement les coûts. Parfois il sera possible de réduire les redondances en se posant quelques questions :
- Deux entreprises fournissent les mêmes services. Est-ce nécessaire ?
- Migrer une solution vers une autre permet-elle de réduire le besoin en support (par exemple avoir 1 expert au lieu de 2) ?
- Et si un service venait à être indisponible, quel en serait l’impact pour les utilisateurs ? Est-ce que je peux envisager de le supprimer ?
Une fois ce premier nettoyage effectué, assurez-vous de mettre en place une gouvernance, somme toute basique mais suffisante, pour garder le contrôle sur les services, les applications et les projets.
De manière régulière, interrogez-vous sur la pertinence des services et l’efficacité des fournisseurs. Cela permettra de connaitre la stratégie à adopter lorsque le contrat arrivera à échéance. En fonction de cette stratégie, il faudra alors se donner du temps pour effectuer les démarches adéquates.
Ne sous-estimez pas le temps nécessaire pour y parvenir, l’effort est considérable mais le résultat en sera d’autant plus grand.
Et si vous souhaitez en savoir plus sur la gestion de portefeuille, il peut être utile de parcourir la littérature dans plusieurs ouvrages de référence tels qu’ITIL et COBIT ou encore PMI.
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